Trois soirées ne suffisent pas évidemment pour balayer l’ensemble de la question de l’impact du numérique sur l’environnement (rappelons que le numérique représente aujourd’hui près de 4% des émissions de gaz à effet de serre – GES – au niveau mondial), et encore moins trois pages.  

On va quand même tenter de vous résumer tout ce qui s’est dit lors la première édition de la Semaine de l’Impact Numérique, qui se tenait du 2 au 4 novembre 2021, avec nos partenaires : Green IT et OVH.  

Mardi 2 novembre 2021 : Du Junky au Concepteur Frugal 
Bertrand Bailly (Davidson consulting) et Frédéric Bordage (Fondateur du collectif GreenIT.fr) 

Le 6ème rapport du GIEC  fait froid (ou chaud plutôt) dans le dos. L’influence de l’homme sur le climat est un fait établi et la planète s’est réchauffée de 0,95 à 1,20°C depuis le début de l’ère industrielle. Les conséquences sont déjà visibles : montée du niveau des mers, réduction de la banquise arctique, recul des glaciers… L’une des causes déterminée ? L’augmentation de la concentration en CO2 dans l’air qui participe à l’effet de serre 

 

 

En 2020 3,8% des émissions de GES sont dues au numérique. En 2010, l’empreinte environnementale du numérique représentait 2%. Elle a donc doublé seulement 10 ans et le collectif GreenIT.fr prévoit la même hausse en a peine 5 ans. Sans réaction collective, le numérique représentera donc 6% de l’empreinte mondiale en 2025 

« Le numérique est une ressource critique, non renouvelable et qui s’épuise inéluctablement » – F. Bordage.  

À cela il faut ajouter que la fabrication des équipements et terminaux numériques repose sur des ressources “finies” comme des minéraux rares, qui seront épuisés d’ici une à deux générations.  

L’addiction que nous avons au numérique que nous avons développé est semblable à celle d’un Junky. C’est pourquoi un changement de mentalité s’impose, nous devons devenir plus sobresRéduire la production d’appareils électroniques, augmenter leur durée de vie, raisonner leur usage… autant d’exemples d’améliorations pour réduire notre empreinte environnementaleCette sobriété passe également par une approche de conception frugale. Cette éco-conception ne se réduit pas à la conception d’une application ou d‘un site web mais plus globalement à un acte métier !

Aussi simple que soit cette action, elle peut être accompagnée d’une multitude de services « annexes » tel que la possibilité de réserver un hôtel, une voiture, promouvoir des marques partenaires, etc… Ces services annexes participent fréquemment au « gras logiciel ». La sobriété numérique vise alors à réduire ce surplus en délivrant le juste service.  

Le constat peut paraitre alarmant. Mais des démarches qui visent à réduire l’empreinte des services numériques se dessinent déjà. A travers l’éco-conception, l’adoption et le partages de bonnes pratiques et d’outils et l’attention portée à un ensemble des métriques, il est possible de réduire drastiquement l’impact environnemental d’un projet numérique. Nous avons voulu en faire la démonstration au travers d’exemples concrets lors de nos interventions suivantes. 

Jeudi 3 novembre : Quels leviers pour une démarche Less-impact ? 
Johann Besse (CDO Davidson Consulting), Hannah Setton (Cheffe de projet IT), Jules Delecour (Lead Culture Tech), Benjamin Danglot (Doctorant en génie logiciel) 

Place à l’action avec une seconde soirée qui présentait la mise en pratique de recommandations et d’une réflexion centrée sur le numérique juste dans une démarche DevOps. 

L’objectif ? Raconter une démarche transversale en commençant par la maitrise de son impact via la gestion de projet. Le PMI® donne un certain nombre de leviers pour y intégrer la maitrise de son impact écologique. Un exemple avec la gestion des risques : en ajoutant un point de plus dans la catégorisation des critères d’impact d’un risque, on lui donne mécaniquement une pondération plus importante, ce qui incite ainsi à mettre en place les actions “low impact”. 

Qui dit projet, dit humain et il est donc indispensable de travailler le plus tôt possible sur la sensibilisation et la formation des équipes de développement, ainsi que de toutes les parties prenantes du projet. Des outils, comme la fresque du climat[1], existent et peuvent être appliqués à différentes échelles dans une organisation : équipe, projet, entreprise… Il est important de choisir ses partenaires (fournisseurs, clients, …) en fonction aussi de leur engagement “low impact” : ainsi ajouter aux habituels critères QCD (Qualité Coût Délai) le critère ”I=impact”.

Quand le bon choix des technologies et le retour à la frugalité permettent de développer des solutions durables, on peut alors parler de « Right-Tech[2]».

Piloter un projet tout en maitrisant son impact nécessite aussi un suivi lors de la phase de réalisation. La culture DevOps/DevSecOps apporte un ensemble d’outils et de métriques pour en assurer la maîtrise. L’objectif :  intégrer directement un ensemble de pratiques et d’outils dans les processus DevOps.

[1] Fresque du climat : Outil de sensibilisation aux changement climatique 

[2] Right-Tech : Concept évoqué dans la gazette n°100 publié par l’école des Mines

En collaboration avec le collectif GreenIT.fr, Orange Business Service, Snapp ‘ notamment, Davidson développe un plugin Sonarqube[1] Open Source qui vise à mettre en valeur des bonnes pratiques d’Eco-coding. D’autres outils sont également développés de la même manière, c’est le cas de GreenIT-Analysis-cli qui « wrap » le plugin Chrome GreenIT-analysis pour mesurer l’EcoIndex d’un site web et proposer des améliorations pour chaque page du site.  L’objectif de ces projets est de développer un ensemble d’outils pour chaque étape du processus de livraison d’un logiciel.

Parmi les étapes de livraison d’un logiciel, la phase de tests est cruciale. C’est aussi un moyen d’analyser son comportement énergétique. A présent, grâce à l’outil Diff-XJoules il est possible de mesurer la régression énergétique des tests unitaires d’une application. Placé dans une chaine d’intégration et de déploiement continue, il permet alors de bloquer ou non le processus de livraison d’une application si la consommation énergétique de celle-ci augmente significativement.

 

[1] Sonarqube : Outil d’analyse de code source développé par la société SonarSource

Donner du sens à toutes ces métriques au travers d’un suivi d’indicateurs et assurer le respect d’un ensemble de bonnes pratiques sont donc le fondement de la démarche Less-impact.

 

Jeudi 4 novembre : Impact environnemental d’un service hébergé
Tristan Vuillier (Directeur des programmes environnements de OVHCloud)

Après le partage des premiers leviers pour adopter une démarche ‘Less-Impact’, une soirée entière devait être consacrée à la gestion du hardware. C’est pourquoi Tristan Vuillier, directeur des programmes environnements de OVHcloud[1], est intervenu pour présenter le concept de service hébergé et détailler les indicateurs environnementaux qui permettent de participer à la réduction de l’impact environnemental d’un service hébergé sur le Cloud.

[1] OVHCloud est une entreprise française de fournisseur de services Cloud. Elle concurrence directement les cloud publics AWS, Azure ou GCP.

Les applications développées délivrent leur service à travers un ensemble de matériels (carte mère, processeurs, alimentation…). La production de ces matériels et leur acheminement (scope 3) jusqu’aux datacenters représentent 63% de l’empreinte carbone du fournisseur de service Cloud OVHCloud tandis que la consommation électrique des datacenters représente 34% de l’empreinte (scope 2).

Finalement, les émissions directes (scope 1) comme celles des bureaux ou des génératrices d’OVH ne représentent que 1% de l’empreinte. Ce qu’il faut retenir de cette répartition, c’est qu’il apparait nécessaire pour l’hébergeur de recycler et d’allonger la durée de vie du matériel utilisé dans ses datacenters. Chaque élément matériel remplacé passe systématiquement par une étape de réhabilitation pour être remis en service si son état le permet. Le cycle de vie du hardware suit alors les étapes suivantes : Réutiliser, Réparer et Recycler.

Le second focus vise à réduire l’empreinte carbone du scope 2 en améliorant les indices de consommation énergétiques des datacenters. Il existe 4 grands indicateurs environnementaux :

  • PUE : Power Usage Effectiveness : Mesure de l’efficacité énergétique d’un datacenter. Les datacenters les plus efficaces tendent (par le haut) vers 1.
  • WUE : Water Usage Effectiveness: Mesure de l’utilisation de l’eau pour les opérations d’un datacenter.
  • CUE : Carbon Usage Effectiveness: Mesure l’intensité de l’usage du carbone dans un datacenter.
  • REF : Renewable Energy Factor: Mesure le taux d’énergie renouvelable utilisée par rapport à l’énergie totale dans un datacenter.
  • Reused components ratio : Le taux de réutilisation des composants réutilisés.

Indices pour OVHCloud

 

C’est grâce à ces indicateurs qu’il est possible de mieux choisir son fournisseur de services Cloud et de participer à réduire l’empreinte carbone de son application ou de ses systèmes d’information.

Pour conclure la première édition de la Semaine de l’impact numérique

Grâce à nos intervenants, nous avons souhaité faire naître une réponse collective et des sources d’optimismes, pour contribuer à l’émergence d’un numérique plus durable face aux enjeux du réchauffement climatique. Nous avons présenté des démarches transversales, mais aussi des solutions, des méthodologies et des projets pour mieux maitriser son impact écologique lors de la conception, du développement et de la mise en service d’un logiciel.

Et comme ce n’est que le commencement, et que la tâche à accomplir reste immense, nous vous proposons donc de continuer à échanger et partager directement avec nous, pour construire conjointement un numérique plus juste et plus sobre : impact@davidson.fr